Européennes : à Marseille, la fracture sociale est aussi dans les urnes

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Le dimanche 9 juin à 20 heures, les résultats des élections européennes sont tombés. À l’échelle nationale, ils placent Jordan Bardella (31,37 %) en première position, suivi de Valérie Hayer (14,60 %), de Raphaël Glucksmann (13,83 %) et de Manon Aubry (8,89 %). Le vote marseillais est bien différent. Si Jordan Bardella (30,14 %) garde la tête, Manon Aubry arrive, elle, en deuxième position (21,54 %). Dans sept arrondissements sur seize, elle devance même le candidat du Rassemblement national.

Ce ne sont pas n’importe quels arrondissements. La candidate de La France insoumise monte sur la première marche du podium dans les quartiers les plus populaires, voire les plus pauvres, comme le démontrent les dernières statistiques de l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques). Les IIIe, XIVe et XVe arrondissements (les quartiers nord), où elle a glané entre 44 % et 54 % des voix, sont les trois secteurs comptant le moins de foyers imposés (24 %, 31 % et 28 %). Ce sont aussi les quartiers qui enregistrent les taux de chômage les plus importants, les revenus médians les plus bas et les taux de pauvreté les plus élevés (52 %, 42 % et 44 %).

LFI, un vote pauvre

Même chose, ou presque, dans les Ier et IIe, où elle a réuni 40,11 % et 36,36 % des suffrages. Là encore, les chiffres de l’institut de statistiques sont éloquents. Dans ces deux secteurs du pourtour du Vieux-Port, les taux de chômage (21,1 % et 17,6 %) et les taux de pauvreté (38 % et 39 %) sont au-dessus des moyennes communales (respectivement à 15,9 % et 26 %).

Dans les deux derniers secteurs remportés par Manon Aubry, les écarts avec les autres candidats, dont Jordan Bardella, sont plus faibles et donc moins significatifs. Dans les Ve et VIe, autour de La Plaine, « lieu de vie très apprécié par la jeune population, notamment en raison de son atmosphère artistique et bohème »dixit l’office du tourisme, la candidate LFI a probablement bénéficié d’un vote « bobo ».

RN, un vote plus aisé

De son côté, Jordan Bardella a fait des adeptes dans les quartiers les plus aisés : les VIIe, VIIIe, IXe et XIIe arrondissements. Là, le taux de pauvreté oscille entre 12 % et 15 % et les salaires médians sont supérieurs à 24.000 euros (contre 13.530 euros dans le IIIe). Il a aussi convaincu dans les secteurs qui sont peu ou prou dans la moyenne de la ville sur tous les critères énoncés précédemment (imposition, revenus, activité…), à savoir les quartiers est (Xe, XIe, XIIIe) et le IVe, plus central.

Reste le XVIe arrondissement, à l’extrémité nord-ouest de la ville. Le scrutin y a été serré. Jordan Bardella a enregistré un score de 31,38 % tandis que Manon Aubry a convaincu 30,98 % des votants. Ce résultat est à l’image du secteur, coupé en deux. À l’est, il est composé des quartiers Saint-Henri et Saint-André, riches en cités sensibles et appartenant aux quartiers nord ; à l’ouest, de l’Estaque et des Riaux, lieux de villégiature de Cézanne, Braque et Renoir, aujourd’hui prisés par la bourgeoisie locale.

Le XVIe est en quelque sorte le reflet de la cité phocéenne. Là comme dans toute la ville, il y a deux mondes, d’un côté les classes aisées, de l’autre les plus modestes. Il y a aussi deux votes, très tranchés, témoins de ces disparités.

Sarah-Louise Guille

Source : BOULEVARD VOLTAIRE – Européennes : à Marseille, la fracture sociale est aussi dans les urnes

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