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La langue araméenne
Nos Sages ont toujours attribué une grande importance à la langue araméenne, ainsi qu’en témoigne le Midrach (Berèchith rabba 74, 14) : « Ne tenez pas à la légère la langue « sursi » (syrienne, terme sous lequel est désigné l’araméen), car le Saint béni soit-Il l’a honorée dans la Tora par les mots Yegar sahadoutha (Berèchith 31, 47), ainsi que dans les Prophètes (Jérémie 10, 11) et dans les Hagiographes (Daniel 2, 4 et suivants ; Ezra 4, 7 et suivants).
Cette importance attribuée à l’araméen est également mentionnée dans la Guemara (Sanhédrin 38b) : « Rav a enseigné : Adam le premier homme parlait l’araméen. »
Historiquement parlant, l’araméen est devenu après la destruction du premier Temple la langue officielle des provinces situées entre l’Euphrate et la Méditerranée.
Il a même supplanté pour une grande part chez les Juifs l’usage de la langue hébraïque, au point que Néhémie se plaint que leurs enfants ne savaient plus la parler (13, 23).
C’est également en araméen qu’ont été rédigés les Talmuds, y compris celui de Jérusalem. L’araméen a acquis de ce fait une dimension particulière dans la pratique et la pensée juive.
Par la suite, il s’est effacé au profit d’autres dialectes, judéo-romans et judéo-germaniques en Europe, judéo-arabes et judéo-persans en Orient.
Seules aujourd’hui quelques communautés juives, originaires du Kurdistan pour la plupart, continuent à pratiquer des variantes juives de langues araméennes. Elles sont collectivement appelées Targoum, et ceux qui les pratiquent les « Juifs targoumis. »
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Haftarath parachath Vayètsè – « Nous rendrons les taureaux par nos lèvres »
Le chapitre 14 du livre d’Osée, qui forme selon beaucoup de rites la haftara de la parachath Wayètsè, contient un verset dont l’interprétation est difficile :
קחו עמכם דברים ושובו אל ה’ אמרו אליו כל תשא עון וקח טוב ונשלמה פרים שפתינו.
« Prenez avec vous des paroles, et revenez à Hachem ; dites-lui : Pardonne toute iniquité, et accepte ce qui est bon, et nous rendrons les taureaux par nos lèvres » (14, 3).
Ce verset, selon le Targoum Yonathan, exprime le souhait que les paroles de nos lèvres soient aussi agréables à Hachem que des taureaux offerts sur l’autel. Ce qui veut dire, comme l’explique le Midrach Pessiqta de-rav Kahana (24, 19) : « Qui va payer pour les taureaux que nous Te présentions jadis sur l’autel ? Ce sont nos lèvres, qui émettent aujourd’hui nos prières. »
Cette interprétation a été reprise et développée par le Tour Ora‘h ‘hayyim (98) : « Il faut émettre ses prières avec la même sincérité que celle d’un mendiant qui demande l’aumône. Il faut les prononcer lentement afin de ne pas donner l’impression de s’en débarrasser comme d’un fardeau dont on veut se défaire.On sera alors assuré que sa prière sera exaucée, car la prière remplace les sacrifices, ainsi qu’il est écrit : « Et nous rendrons les taureaux par nos lèvres. » Il est également écrit : « … et de Le servir de tout votre cœur et de toute votre âme » (Devarim 11, 13). Quel est ce « service par le cœur » ? C’est la prière, qu’il faut prononcer avec la même sincérité que les sacrifices que l’on présentait au Temple, et qui étaient rendus inopérants s’ils étaient associés à des pensées inappropriées. »
Jacques Kohn zal
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L’ingratitude d’Israël
La raison du choix de cette haftara pour la parachath Wayètsè apparaît dès le premier verset : « Jacob s’enfuit dans la plaine d’Aram ; et Israël servit pour une femme ; et pour une femme, il garda [des troupeaux] » (12, 13).
Dans le contexte de ce verset, explique Radaq , le prophète Osée exprime l’amer mécontentement de Hachem envers Efrayim, personnification du Royaume d’Israël créé par Jéroboam après la mort de Salomon : Il ne se souvient pas du bien qu’Il a fait à leur ancêtre lorsqu’il a fui de chez son frère Esaü. Jacob a dû travailler comme berger pendant sept ans pour pouvoir épouser une femme, puis pendant sept autres avant de convoler avec une autre. Pendant toutes ces années, Hachem lui a prodigué Ses bienfaits afin qu’il puisse ensuite retourner en Canaan avec d’abondantes richesses.
Jadis, s’indigne le prophète (13, 1), « quand Efrayim parlait, c’était une terreur ; il s’éleva en Israël : mais il se rendit coupable par Baal, et il mourut ».
« Il s’éleva en Israël » est une allusion aux bonnes intentions qui ont animé Jéroboam lorsqu’il s’est dressé contre le roi Salomon : « Voici à quelle occasion il leva sa main contre le roi : Salomon bâtissait Milo, et fermait la brèche de la ville de David, son père » (I Rois 11, 27).
Milo était un quartier de Jérusalem que le roi David avait destiné à servir de lieu de rassemblement aux pèlerins qui se rassemblaient lors des grandes fêtes. Mais son fils Salomon l’utilisa comme lieu de résidence pour la fille de Pharaon.
C’est à cette occasion, nous explique la Guemara ( Sanhédrin 101b), que Jéroboam a été animé de bonnes intentions :
« Rabbi Yo’hanan a enseigné : Quel est le mérite qui a valu à Jéroboam de devenir roi ? C’est parce qu’il a eu le courage de critiquer l’action du roi Salomon. Et pourquoi alors a-t-il été puni ? C’est pour l’avoir fait publiquement.
Ainsi qu’il est écrit : ? Voici à quelle occasion il leva sa main contre le roi : Salomon bâtissait Milo, et fermait la brèche de la ville de David, son père.?
Il lui a tenu ce langage : le roi David ton père a pratiqué des ouvertures dans les remparts [de Jérusalem] pour permettre à Israël de monter [librement] en pèlerinage, et toi tu les as barrées afin de [pouvoir contrôler les entrées et] percevoir des taxes de péage au profit de la fille de Pharaon.
Cependant, a enseigné rav Na’hman : c’est son orgueil démesuré qui lui a valu de disparaître du monde, ainsi qu’il est écrit : Jéroboam s’est dit en son c?ur : Maintenant le royaume pourrait bien retourner à la maison de David. Si ce peuple monte pour faire des sacrifices dans la maison de Hachem à Jérusalem, le c?ur de ce peuple retournera à son maître, à Roboam roi de Juda, ils me tueront et retourneront à Roboam roi de Juda (ibid. 11, 26). »
Mais il a sombré depuis dans l’idolâtrie, continue le prophète. Aussi Samarie sera-t-elle détruite, et ses habitants seront exterminés (14, 1).
Jacques Kohn Zal.
Nous poursuivons la saga des patriarches avec le départ de Yaacov qui quitte Eretz Israël pour se marier en se rendant donc à ‘Haran. La Guémara de Kétoubot déduira de là que l’on ne peut quitter la terre d’Israël que pour se marier ou pour une raison matérielle urgente liée à la » parnassa » (la subsistance économique personnelle).
Et voilà qu’après avoir fondé sa famille et après avoir connu le bonheur de la naissance de Yossef, le premier fils de Rahel, Yaacov demande à revenir en Eretz Israël.
En effet, Yossef étant né, l’histoire peut continuer son cours. Yaacov arrive donc en Israël où il est accueilli par des anges. On notera qu’en quittant le pays, 22 ans auparavant, il avait eu ce songe, si fort au plan symbolique, où il voyait des anges monter et descendre d’une échelle : le Talmud dira qu’il s’agissait des anges d’Eretz Israël qui l’accompagnaient à sa sortie (en montant), puis ceux de » houtz laaretz » qui venaient à sa rencontre (en descendant).
Il en sera de même au retour, et la notion ici développée est donc celle d’ « anges » qui ne quittent pas Eretz Israël et d’autres qui sont affectés en dehors d’Israël. Et l’on constate que les uns et les autres se sont associés pour ne pas que Yaacov risque un seul instant de manquer de Protection divine.
Même si nous ne voyons pas quant à nous des anges, cette idée me semble constituer aujourd’hui encore le thème central de notre génération : celle d’un peuple présent à la fois en dehors et en Eretz Israël qui a ici et là des anges autour de lui, lesquels se rejoignent ! Voilà pourquoi la lecture de la paracha Vayetsé s’achève par le mot » ma’hanayim » – la double demeure ou le double camp.
En fait, c’est bien ainsi que se construit l’histoire juive avant l’arrivée du Machia’h : un camp en Eretz Israël, un camp en dehors, mais tous les deux reliés l’un à l’autre, chacun jouant son rôle au bénéfice de tous.
Cette dialectique est le début de la construction du peuple d’Israël, un processus qui se poursuit jusqu’à nos jours et qui bientôt trouvera son heureuse issue avec la reconstruction du troisième Temple de Jérusalem et la venue du Machia’h.
Nous voyons donc à cette occasion que l’unité des Juifs autour d’Eretz Israël n’est pas une simple formalité mais une condition nécessaire pour que l’histoire puisse avancer : elle est le gage de la Protection divine ! Et voilà pourquoi penser que l’un a plus d’importance que l’autre, c’est déjà commettre une grande erreur…
Je crois que la grandeur de notre peuple, c’est justement d’avoir toujours considéré que chacune de ces deux parties de notre peuple est indispensable, chacune dans son rôle !
La double demeure d’Israël, par le Rav Haïm Yossef Sitruk Zal
Par le Grand rabbin ‘Haïm Yossef Sitruk Zal
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Quand Israël sait se dresser au-dessus des astres…
Depuis toujours, les hommes ont rêvé de pouvoir prédire l’avenir – ce qui constituait autrefois une « vertu »… Ainsi, les Anciens avaient-ils recours à toutes sortes de divinités et stratagèmes.
La Torah explique quant à elle que Lavan – le père de Rachel et Léa – interrogeait l’avenir à l’aide de ses térafim. D’après le Midrach (voir paracha Térouma), il s’agissait d’« idoles domestiques ». Or même Yossef en Égypte semblait faire de même avec un kos – une coupe avec laquelle il procédait à des divinations pour deviner l’avenir… Ni condamnable ni recommandable, cette conduite exige des explications.
Le Midrach rattache l’étymologie du mot térafim à l’expression rifyon yadayim (faiblesse de la main).
les térafim étaient de petites idoles semblables à des bébés modelées en argile. L’artisan commençait à les façonner avec la main droite et les terminait avec sa gauche : la main « faible » continuait le travail de la droite. Et donc le futur vu par les térafim était uniquement un futur prévisible, comme la main gauche qui ne fait que suivre la droite… Ainsi en est-il dans la vie : le « futur » dont se gavent les nations concerne un avenir prévisible prenant en compte la nature humaine, ses habitudes et toutes sortes d’autres facteurs.
On pourrait dire qu’aujourd’hui, les ordinateurs procèdent de la même façon, par exemple lorsqu’en France, le programme Bison futé nous renseigne sur ses « prévisions routières » à partir de la météo et des habitudes vacancières des Français. Désormais informatisé, ce futur-là s’agence comme les térafim de Lavan : de la pure technique sans sens !
Mais le futur dont parle la Torah est tout autre. Ainsi, les prophètes d’Israël sont-ils inspirés par D.ieu : l’Éternel leur communique une vision globale de l’avenir qui intègre une réalité future prenant en compte un facteur qu’aucun ordinateur ne peut intégrer : la téchouva (retour à D.ieu) ! Car tout homme peut changer : un Juif peut renoncer à tel week-end ou tel repas d’affaires… après avoir décidé de manger casher ou de respecter Chabbat.
En fait, les Juifs sont passés maîtres dans l’art de « brouiller les cartes » !
Même chose au niveau collectif avec Israël : tout est inattendu, au niveau de l’État comme du peuple, car Israël n’obéit à aucun oracle, prévision ou prédiction. C’est là la grandeur du ce peuple ! Alors qu’on avait annoncé tant de fois dans de « doctes » livres son extermination ou son assimilation, rien de tout cela ne s’est réalisé ! Tous ces spéculateurs de l’avenir avaient tout simplement oublié qu’Israël est un peuple pouvant à tout moment changer son destin par la téchouva. Ainsi à Roch Hachana et Kippour, D.ieu est-Il prêt à modifier son propre jugement, car même Lui peut être surpris par la décision de l’homme.
C’est là un destin extraordinaire, car cela signifie que rien n’est écrit d’avance et que tout ne dépend que de l’homme, de son libre arbitre et du choix qu’il va faire ou pas de servir D.ieu… et par, là-même de se situer au-dessus de tous les astres !
Par le Grand Rabbin Sitruk,en partenariat avec Hamodia.fr
Quand Israël sait se dresser au-dessus des astres…
(Source : Chiourim.com)
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