Macron a perdu un ami, l’horrible boucher de Téhéran !

3 800+ Sourire Moqueur Stock Illustrations, graphiques ...

En Iran, les aéronefs ne tombent pas. Ils font des atterrissages un peu brutaux. C’est ce qui est arrivé à l’hélico du Président Ebrahim Raïssi. Un Bell 212 de fabrication US. Mauvais choix qui a dû déplaire à Allah.

Après bien des tergiversations (le temps de négocier sa succession ?) les autorités ont annoncé la mort du boucher de Téhéran. S’ensuivit un torrent de larmes de crocodiles. D’abord chez les sunnites qui détestent les chiites et réciproquement. Puis chez les eurotocrates qui, en théorie, tiennent l’Iran pour infréquentable… On ignore si Macron va profiter de l’occasion pour tenir sa promesse faite aux mahométans de leur céder un des grands salons de l’Élysée pour en faire une mosquée.

Je parie qu’on va encore accuser le Mossad d’avoir saboté l’appareil. Rien n’est impossible, surtout en représailles aux 350 drones et missiles iraniens tirés sur Israël le 13 avril. Mais l’ayatollah avait tant d’ennemis dans son propre pays, y compris parmi les religieux, que je regarderais aussi de ce côté-là.

La robe du religieux pour recouvrir la tenue du bourreau

Jusqu’à l’âge de 20 ans, il fait des études pour devenir un « savant de l’islam ». C’est-à-dire pouvoir réciter par cœur le Coran en arabe et en farsi. Tant que règne le Shah avec son implacable police politique, la Savak, il évite de se faire remarquer. Quand d’autres, plus courageux que lui, risquent leur peau pour faire la révolution islamique.

En 1980, après le retour à Téhéran de Khomeiny (que Giscard a sottement bichonné pendant son exil à Neauphle-le-Château), Raïssi interrompt ses études. Il sera savant comme Greta. Par science infuse. Aujourd’hui on dit « connaissance intuitive ». Ça dispense les cancres de travailler.

À 20 ans, avec un bagage juridique limité à la charia pour les nuls, il est nommé procureur de la province de Hamedan. Aussi compétent et expérimenté qu’un Gabitounet. Devant son poste à la faveur du prince, il est tenu de faire ses preuves. C’est-à-dire, sous le nouveau régime, faire tuer tous ceux qui ne sont pas d’accord avec le pouvoir. Et même ceux qui sont seulement suspects de mal penser.

Ça tombe bien, la province de Hamedan regorge de Kurdes sunnites (donc ennemis), de nomades Lors d’origine irakienne pratiquant un islam approximatif (donc ennemis) et d’Azéris chiites mais sécessionnistes (donc ennemis). On comprend qu’il ne compte pas que des copains dans le coin. Même quarante ans après. Coïncidence ? C’est pas loin de là que son hélico a fait un « atterrissage mouvementé ».

À 28 ans, il est promu maître assassin

Ses diligences lui valent une belle promotion. À 25 ans, il est nommé procureur de Téhéran. On le dit sûr et implacable avec les rebelles comme avec les hérétiques. Il va donner toute la mesure de son talent au cours de l’été 1988, à la fin de la guerre contre l’Irak. Plus besoin de jouer l’unité nationale contre l’ennemi extérieur.

Sous sa houlette, après des simulacres de jugements collectifs, des milliers d’opposants, prisonniers politiques, sont liquidés. Ils avaient pourtant contribué au retour de Khomeiny, mais ils ne le vénéraient pas suffisamment. Parmi ces insolents, une majorité de moudjahiddines du peuple iranien, dont des chefs avaient tenté une impossible synthèse entre Marx et Mahomet.

Raïssi devenu procureur d’Iran, préside un « comité de la mort » qui condamne comme apostat tout individu qui a exprimé des réserves envers le gérontocrate illuminé. Intellectuels et artistes, syndicalistes et chefs d’entreprises, dignitaires locaux et militaires. Une hécatombe parmi les cadres. Les gauchistes et les coraniques sont faits pour s’entendre comme la mangouste et le cobra. Allô Merluchon ? Tu m’écoutes ?

Il s’était fait un paquet d’ennemis y compris chez les religieux

Il lui faudra quinze ans pour faire oublier ses persécutions contre des mollahs de province qu’il trouvait trop tièdes. Comprendre pas assez sanguinaires contre les cibles qu’il leur désignait… Mais certains religieux de la base étaient appréciés et soutenus par des ayatollahs locaux. Les luttes de clans que cela va déclencher perdurent encore.

Sa carrière connaîtra un ralentissement jusqu’en 2005 quand Mahmoud Ahmadinejad le nomme ministre des Renseignements et de la Sécurité. Raïssi préfère laisser la place à un comparse dont il tire les ficelles. Ainsi il peut continuer ses activités commerciales tout en enrichissant ses dossiers de données sur tous ses compatriotes. Car pour lui, tout citoyen est d’abord un suspect. Déjà presque un condamné.

Malgré les soutiens dont il bénéficie, Raïssi sera battu à plate couture (38 % des voix) lors de la présidentielle de 2017, dans un système qui panache une démocratie formelle avec une cooptation où le rôle des élections est de confirmer le choix des religieux de haut rang, réunis dans une assemblée non élue d’« experts »… Raïssi en sera nommé vice-président en 2019. Un lot de consolation. Ça va l’aider pour la suite. Sans faire l’unanimité de ses pairs.

Élu Président de la République islamique en 2021, avec 72 % des voix (moins bien que Chirac !) Ebrahim Raïssi se considère comme le successeur légitime du Guide de la Révolution, Ali Khamenei. Il est très influent dans les milieux conservateurs et parmi les Gardiens de la révolution. Doublure de Khamenei qui a été son maître à penser, Raïssi n’est pas reconnu par les chiites comme une autorité sur le plan religieux. Un handicap dans un régime théocratique.

Pour pallier cette faiblesse rédhibitoire dans le système iranien, il se pare du titre d’ayatollah que ses confrères lui contestent. Il se proclame alors seyyed, c’est-à-dire descendant du Prophète. Et adopte la tenue de rigueur, entre “man in black” et grand mamamouchi… Peut-être qu’il en fait trop ? Incitant ses    « collègues » à se débarrasser de lui. D’autant que l’homme chapeaute une nébuleuse financière, source de féroces rivalités.

La religion c’est bien, le pognon c’est mieux

En mars 2016, Raïssi avait démissionné de tous ses mandats, député, procureur général, expert en religion, pour devenir président d’Astan-e Qods Razavi, la plus riche fondation religieuse (Bonyad) du monde musulman. Plus riche que celles du Qatar, des Émirats ou d’Arabie.

Cette fondation administre le mausolée de l’imam Reza situé à Mechhad, ville sainte pour les chiites, et touche de juteux subsides sur les pèlerinages, mais ce n’est que de l’argent de poche. Cette entité qui existe depuis 1200 ans fonctionne comme une multinationale. Avec des succursales dans de nombreux pays, des prête-nom là où il vaut mieux passer inaperçu, et des banques islamiques.

Elle gère un nombre impressionnant de conglomérats économiques aussi bien dans la pétrochimie que dans l’immobilier, l’électronique, les centres commerciaux, et le transport maritime et aérien… Ce n’est pas une menace immédiate pour la France, sauf lorsque leurs sicaires viennent y commettre quelques attentats, car ils cherchent moins à convertir les infidèles que les sunnites.

Accident ou pas, ça arrange beaucoup de monde !

Des trois hélicoptères transportant les dignitaires du régime venus inaugurer un barrage dans l’Azerbaïdjan iranien, deux ont regagné Tabrizau retour sans souci. Celui transportant le Président, le ministre des Affaires étrangère et d’autres huiles s’est écrasé dans une zone montagneuse difficile d’accès, lors de conditions de vol défavorables du fait de perturbations météorologiques. Version officielle.

En Iran où le véritable pouvoir est entre les mains du guide suprême, l’ayatollah Khamenei, la mort de tout autre Président que Raïssi n’aurait guère eu d’influence sur la suite des événements. Mais dans la mesure où il briguait la suite de Khamenei âgé de 85 ans, cela devrait à terme redistribuer les cartes. D’autant que le guide est lourdement handicapé depuis un attentat. Très malade, et aphone, ses discours écrits par Raïssi étaient lus pendant qu’il somnolait.

Les bénéficiaires du changement pourraient être des responsables encore plus radicaux que le boucher, tenu pour un « modéré » par un Occident aveugle et sourd. Après l’intérim des 50 jours, on saura si l’équipe gagnante sera composée de réalistes, féroces dans leur pays mais accommodants avec le monde extérieur. Ou si on aura affaire à des énergumènes intraitables dans leur volonté d’acquérir l’arme atomique, et de détruire Israël.

Dans un pays qui est en ébullition depuis l’assassinat de Mahsa Amini pour une connerie de foulard, et les manifestations qui ont suivi, tout est possible. Surtout avec un régime qui a eu très peur, et n’est pas près de desserrer les vis.

Christian Navis

Source : RIPOSTE LAÏQUE – Macron a perdu un ami, le boucher de Téhéran

Laisser un commentaire